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Paul Dequidt
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Corona Café / 18

Dimanche 10 janvier 2021

Aventurier-torréfacteur, histoire d’une vie …

Du rêve ! On veut du rêve !
Après deux confinements (bientôt trois ?), des voyages annulés et dix-huit semaines de fermeture des cafés,
on tourne en rond sous notre masque.
On veut de l’aventure, du risque, de la passion, du café – du vrai.
Des gens qui iraient le chercher aux quatre coins du monde au péril de leur vie …

Paul Dequidt est l’un d’eux, « torréfacteur aventurier », comme il se qualifie. Informaticien chez Damart au départ,
il travaillait sur les premiers ordinateurs à cartes perforées. Passé ensuite chez Grand’Mère (celle qui portait un blouson
de cuir et savait faire un bon café !), il a découvert ce produit … qui est devenu sa passion !

– Aventurier, parce que pour dénicher les meilleurs arabicas, il parcourt sans cesse le globe. «  El Gringo*, c’est moi ! »,
se plait-il d’ailleurs à dire. En près de 40 ans, il a exploré des terres hostiles, découvert les tribus les plus reculées
et vécu des guet-apens. Ces expériences, il les partage avec ses clients, à travers ses mailings, son blog, ses livres.
« Je me suis fait tirer ­dessus plusieurs fois ; j’ai toujours aimé les expéditions qui me mettent en danger », dit-il.
Et, son chapeau à larges bords vissé sur la tête, il reprend ses récits de voyages dans des terres inconnues
où il rencontre des peuplades qui n’ont jamais eu de contact avec nos sociétés modernes.

– Torréfacteur dans son garage près de Lille au début ; son entreprise** comporte à présent une brûlerie de cafés précieux, où il ne torréfie que de grands crus d’arabicas … et moult autres bâtiments !

– Torré-facteur pourrait-il ajouter, car il ne le vend que par correspondance – et maintenant sur internet (il s’est même mis aux dosettes !) Mais aussi, as du marketing : au delà de la qualité de son café et des cadeaux qu’il offre dès le premier colis, il établit une relation très personnelle avec ses clients en se mettant en scène avec sa famille. En leur faisant suivre leurs aventures au fil des années***, il les fidélise. Et en les ouvrant à d’autres cultures, il leur offre du rêve. Le voilà donc,
celui-que nous cherchions ! Ce rêve a un prix car il va le chercher les armes à la main … gare au coup de fusil !

https://www.pauldequidt.com

* Référence à la célèbre publicité de Jacques Vabres après 85,
où cet expert de la sélection des grains parcourait la planète à la recherche des meilleurs cafés.
** Créée en 1983 ; chiffre d’affaires de plus de 17 millions d’euros en 2018.
*** ­« Un avion en perdition en Ethiopie », « Kidnappé par des Samburu au Kenya », « Les féticheuses Vaudou
au Togo », « Incarcérés au Cameroun », « Guérilla au Guatemala », « L’enfer vert des Yanomami » etc.


Cassette, rue de Rennes
03/01/2021

Cassette

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Corona Café / 17

Dimanche 3 janvier 2021

Cassette, 73 rue de Rennes, 75 006 Paris
Tous les jours, de 7h à 2h à l’ordinaire,
actuellement et pour la dix-septième semaine depuis la pandémie,
du mercredi au dimanche de 12h à 20h :
vente uniquement à emporter (boissons, huîtres et crêpes)
Prix du café-enlevé : 1,60 €

L’Assoiffé dégringole la rue de Rennes de Montparnasse jusqu’au Cassette* :              

Au secours ! Au secours ! A l’assassin ! Au meurtrier !
Juste Ciel ! Je suis déshydraté, on m’a asséché le gosier, on m’a lyophilisé !
Qui est ce Covid ? D’où vient-il ? Où se cache-t-il ?
Comment faire pour l’arrêter ? Où me faire vacciner ?
Depuis que je suis masqué, mon esprit est troublé ;
j’ignore où je suis, qui je suis et ce que je fais.
Qu’on me donne un café !
Euh ? Que dites-vous ? Je suis arrivé ?

C’est un mirage, une oasis : ma Cassette !
Elle vient d’avoir 100 ans ? On ne le dirait point !
Elle est si joliment fleurie et colorée avec ses plantes luxuriantes**, ses parasols bariolés et ses drôles d’animaux chapeautés. Au loin, les cloches des bien nommées Notre-Dame-des-Champs et Saint-Germain-des-Prés se font écho ;
pour un peu, on se croirait au bout du monde.
Mais je suis loin d’être seul ; sa champêtre terrasse est visiblement très prisée. A distance réglementaire, chacun attend paisiblement son tour, que dis-je : son Graal ! Il fait un froid de gueux, les chauds breuvages sont ardemment espérés. 
Le garçon s’active derrière sa rangée de tables transformées en comptoir …

Cassette : « coffret destiné à conserver des objets précieux ».
Jamais taverne n’aura si bien porté son nom, tant il est vrai que le Café est désormais devenu un trésor.
Et en ce jour glacial, une telle découverte a de quoi réchauffer le cœur !

https://www.cafecassette.com

* Librement inspiré de l’Avare de Molière (Monologue d’Harpagon, acte IV, scène 7)
** Artificielles et donc quelque peu kitsch … mais non dépourvues de charme 😉


Père Noêl : le dernier recours ?
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Corona Café / 16

Jeudi 24 décembre 2020

Lettre au Père Noël

Cette année encore, le Père Noël a reçu des lettres par milliers.
L’une a tout particulièrement retenu son attention :
celle de la gérante du Café du Cheval Blanc, dans le Territoire de Belfort.

Cher Père Noël,

Cela va certainement te paraître bizarre car j’ai largement passé l’âge d’écrire au Père Noël. Je ne suis même pas certaine d’ailleurs de l’avoir fait un jour. Donc pour la première fois, à 57 ans, je t’envoie une lettre au nom de tous les bistrotiers de France.

Ce ne sont pas des aides dont nous avons besoin, nous voudrions juste pouvoir travailler. Nous voulons reprendre notre place derrière le comptoir, accueillir nos clients avec le sourire et un petit mot pour chacun. Parce que malgré tout ce qu’on pense
des gens qui fréquentent les bars, ce n’est pas seulement pour boire qu’ils viennent, mais avant tout parce que ce sont des lieux d’échanges. Des endroits où se retrouvent des personnes de milieux social, familial et professionnel différents qui n’auraient jamais eu l’occasion de se rencontrer sinon.

Pour les 200 000 patrons de bars-restos que nous sommes, le plus beau cadeau que tu pourrais nous faire serait l’autorisation
de rouvrir nos établissements. J’espère très très fort, cher Père Noël, qu’il fera partie de ta distribution.

Alors ce soir à 19h, quand Gibus et moi tirerons le rideau de notre petite vente à emporter, nous ferons comme les enfants
quand ils étaient petits : nous déposerons un verre de vin pour toi et 9 carottes pour Rudolph, Tornade, Danseuse, Furie, Fringant, Comète, Cupidon, Tonnerre et Eclair, au pied du sapin, devant notre bistrot. Puis nous rentrerons chez nous en rêvant
à la bonne surprise que nous trouverons demain matin.

Avec toute mon affection, cher Père Noël, ValH … parce que l’enfance dure toute la vie.

Le légendaire vieillard va-t-il exaucer ses vœux ?
Bientôt 16 semaines de fermeture, on en annonce 4 de plus – voire davantage ! 
Le service de vente à emporter ? Il a permis à Val’ de voir du monde mais n’a pas rempli pas sa caisse. Les subventions ?
Un pis-aller. Notre gérante accuse le coup autant que le coût. Elle compte sur la magie de Noël …

https://www.facebook.com/CAFEDUCHEVALBLANCMorvillarsValGibus/


Noël au café
20/12/2020

Conte de Noël

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Corona Café / 15

Dimanche 20 décembre 2020

Conte de Noël 

Le Père Noël est cas contact : un de ses lutins a été testé positif au Covid 19.
Il doit donc rester en septaine* jusqu’au 26 au soir. Une catastrophe !
Le voilà obligé de mettre ses lutins en chômage partiel et vendre ses rennes sur Leboncoin. S’en remettra-t-il ?

Et les enfants ? Qui va leur apporter leurs jouets ?
Ils ont été rudement éprouvés depuis le 15 mars : des mois de confinement, la reprise de l’école avec des masques,
circuits de circulation et autres gestes barrière, et aussi l’interdiction de faire des bisous à leurs papis et mamies.
S’il y a bien un Noël où ils ont besoin d’un peu de rêve et de réconfort, c’est celui-là !

Plutôt que de rester (en)terré dans son café une quinzième semaine, un bistrotier décide de passer à l’action.
Il sait que vide-greniers et brocantes ont tous été annulés et que beaucoup de parents n’auront pas les moyens
de remplacer le Père Noël. C’est donc lui qui va s’en charger. Il met en place une hotte-line** : « Et si vous donniez
une deuxième vie aux jouets en bon état que vous n’utilisez plus ? Allez-y, faites du tri, rangez vos chambres et donnez ! ».

L’initiative fait un tabac. Malgré le Covid et les contraintes, les jouets affluent. Les gens n’ont pas forcément beaucoup
mais ils ont conscience que d’autres n’ont quasiment rien. En un temps record, les joujoux arrivent par milliers.
Le café déborde de toutes parts, c’est tout juste si l’on peut se faufiler. Les peluches ont remplacé les clients.
Sur les mange-debout où les seconds se partageaient des planches de fromages ou de charcuteries, livres et jeux de société s’empilent à des hauteurs vertigineuses. Désoeuvrés comme lui, des collègues sont venus lui donner un coup de main :
on trie, on empaquette, on expédie. Le bistrot retrouve son activité bourdonnante et son esprit de convivialité – dans
le respect des règles sanitaires : parmi les dons, du gel hydro-alcoolique, des masques, gants, sprays désinfectants,
sacs poubelles et cartons.

Son café était considéré comme non essentiel ? Il est devenu essentiel.
Et notre Père Colateur transformé en Père Noël a réussi à remplacer ses mauvais comptes en joli conte de Noël*** !

*  Isolement dorénavant fixé à 7 jours.
** Centre d’appel d’urgence.
*** D’après une histoire vraie, celle de Yoann Hessemans, patron du Castle Pub à Fontainebleau 
et du Paddy Rock à Chailly-en-Bière qui a lancé l’opération « Range ta chambre solidaire ».
Seize communes de Seine-et-Marne y ont ainsi participé durant le mois précédant Noël.


Quelle histoire !
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Corona Café / 14

Dimanche 13 décembre 2020

Quelle histoire !

1644, « Porte de l’Orient » : un négociant marseillais rapporte des grains de café de Constantinople, avec tout le nécessaire pour le préparer. Le succès est immédiat. Dix ans plus tard, la première « maison de café » ouvre dans la cité phocéenne.

A Paris, il faut attendre 1657 : un célèbre voyageur* de retour du Moyen-Orient, introduit à son tour la fève dans la capitale. Dépêché auprès de Louis XIV pour renouer l’alliance avec la France, l’ambassadeur du sultan de l’empire ottoman l’introduit à la Cour quelques années plus tard. Il profite de son séjour pour organiser de grandes réceptions où la haute société découvre cette boisson brûlante servie dans des tasses en porcelaine de Chine par des esclaves enturbannés.

Les détracteurs sont nombreux ; ils tentent de prouver que le café procure des maladies épouvantables.
Même le pape Clément VII, pourtant amateur, est obligé par l’église d’interdire ce breuvage « noir comme le diable ».
Heureusement, les médecins lui trouvent des vertus thérapeutiques : « il désenyvre sur le champ ceux qui ne sont
pas yvres au premier degré, tient les reins ouverts, aide les maladies spéciales des femmes, dissipe les migraines,
est souverain contre les maladies hystériques, la jaunisse, les tumeurs froides, les abcès et les maux de dents ».

En 1672, un Arménien ouvre le premier débit de café à Paris … pour le fermer peu après : c’est un échec.
Un de ses anciens serveurs s’en inspire pourtant, et crée le Procope** en 1686. Elégant et luxueux, les beaux esprits
aiment à s’y retrouver***. Peu à peu, les cafés deviennent des lieux où les idées libérales naissent et fleurissent.

Sous le règne de Louis XV, l’or noir devient véritablement à la mode : il faut dire qu’il l’apprécie tellement que
non seulement il le fait cultiver dans les jardins de Trianon, mais il torréfie lui-même sa récolte et aime à le préparer.
Les serviteurs de Versailles s’en emparent et en rapportent chez eux ; le clergé s’y met aussi …

Dès le début du XVIIème siècle, la France avait transplanté les pieds offerts au Roi par la Hollande vers l’île Bourbon***
et les Antilles. Quelques décennies plus tard, elle devient le premier pays producteur de café grâce à ses plantations.
La demande est croissante et les débits de café se développent. En 1860, on en compte 3000 à Paris et durant la campagne d’Italie, le café fait partie de la ration militaire des soldats : les derniers français n’y ayant jamais goûté le découvrent enfin.

* Jean de Thévenot, connu pour ses récits de voyages en Europe, Inde, Afrique du Nord et Moyen-Orient.  
** Toujours ouvert de nos jours : http://lescafesdottilie.fr/le-procope-paris/
*** Balzac, Hugo, La Fontaine, Rousseau, Verlaine, Voltaire et tant d’autres.
**** Ile de la Réunion.

Illustration : « Femme versant du café », de Louis-Marin Bonnet (1774)


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