Coronavirus Café / 5
De Ottilie
Dimanche 19 avril 2020
Ras la cafetière !
Trente-six jours déjà que les cafés sont fermés :
Inutile de vous dire que je suis au trente-sixième dessous !
Un tsunami viral s’est abattu sur notre pays. La France a déclaré la guerre au coronavirus. C’est l’immobilisation générale ! En bon petit soldat, je respecte scrupuleusement les recommandations. Comme tout le monde (ou plus exactement,
un peu plus de la moitié du monde), je reste confinée. Claquemurée, 23h/24 !
Au début, j’enfourchais mon vélo d’appartement pour me rendre à mon télétravail, mais depuis deux semaines,
je suis en télévacances : ça change tout ! Je peux ne rien faire de la journée ; si je n’ai pas fini, je continue le lendemain.
Au fait, quel jour est-on ? Mermanche ou lundredi ? J’interroge ma cafetière faute d’avoir pu poser la question à mon livreur de capsules : il s’est contenté d’un bref signe de l’autre côté de la porte. J’avais pourtant enfilé un gant de toilette pour lui donner un pourboire. C’est que je suis consciente des risques qu’il encourt pour me porter ces produits – de toute première nécessité, est-il besoin de le rappeler.
Une heure par jour, nous avons droit à la trêve des confineurs. Je demande à mon téléphone l’autorisation de sortir
à moins d’un kilomètre. Faute de masque, je fais trois tours avec mon foulard. Je peux ainsi faire mes courses « essentielles » avec un minimum de sécurité. Mais chaque fois que je croise un passant, je fais quand même un écart.
On ne sait jamais !
A l’entrée de la supérette, le vigile asperge nos mains de gel hydroalcoolique. Il veille aussi à ce que les distances
de sécurité soient respectées. Et surveille les psychopâtes et autres sérialstockeurs qui voudraient vider les rayons !
Heureusement, au pays des Gaulois, il y a des irréductibles.
Notre boulangère en est une. Elle ne craint pas d’être démasquée. Elle n’a pas non plus marqué de traçage au sol.
Cela dit, je ne suis pas sûre qu’il y ait deux mètres dans son espace clients.
Mardi, pour fêter la fin du premier mois de confinement, elle avait apporté sa cafetière et proposait un expresso à tous
ses habitués. Elle nous l’offrait dans un simple gobelet en carton, certes ; et nous invitait à le déguster dehors, forcément. Mais il était surmonté d’une crème onctueuse et dégageait des arômes prometteurs. Dès la première gorgée, un vrai nectar glissait sur notre palais. Et bien après la dernière, on profitait encore de sa belle longueur en bouche. Au soleil,
sur l’avenue, tous ensemble mais à un mètre d’écart les uns des autres, nous avons partagé … un pur moment de félicité !
Pour conclure : un café déconféïné … ou l’art de se resocialiser à distance.
Ben,il avait l’air ben bon ce café offert par ta boulangère,sur un simple trottoir….très touchant ces attentions en période de distanciation.j’ai du mal à imaginer Paris sans ses cafés,ça fait tellement partie du patrimoine culturel…Merci pour ton article Tilie.
De rien … ou plutôt si : de beaucoup, tant trouver des sujets sans pouvoir tester de vrais cafés relève de la gajeure en ce moment ! Et on nous dit que cela va durer un deuxième, un troisième et même un quatrième mois : autant dire, l’éternité ! Dis-moi que si toute la Gaule est infectée, notre village breton a su résister à ce coronavirus !